LA MOUETTE DE LISOU BISOU
Un dimanche matin à la maison
Il était une fois, une petite fille câline, moitié garçon manqué moitié petite fille qui s'appelait Lisou-Bisou. Lisou-Bisou aimait l'aventure et tout ce qui était nouveau la passionnait. Elle habitait la Cité des fauvettes et avait sept frères; mais Félix était son préféré. Elle était rieuse, avait des couettes brunes retenus par des chouchous et parfois, un petit nœud de velours de couleur pour tenir une mèche qui lui chatouillait le nez, car elle tombait toujours. La maison était petite, pleine de chansons et de lits superposés: tous les enfants dormaient, en effet, dans une grande chambre bleue au ciel étoilé.
Parmi les jouets de la chambre, il y avait une grande mouette de bois blanc que l'on pouvait faire monter et descendre du plafond, grâce à une corde qui descendait presque jusqu'au sol. Et quand on la faisait descendre, ce que Lisou-Bisou aimait beaucoup faire, la mouette agitait ses ailes blanches, comme si elle allait prendre son envol.
Ce dimanche, donc, aucune sortie n'avait été prévue: pas d'anniversaires, pas de sorties cinéma, pas de balades en forêt. Pas de chasse au trésor. Rien à l'horizon: la journée promettait d'être ennuyeuse.
Aussi, Lisou-Bisou, allongée sur le tapis de sa chambre, tirait nonchalamment la corde de la mouette qui montait et descendait en battant de ses grandes ailes blanches.
Lisou-Bisou entendit alors comme le bruit de la mer, ce bruit des vagues qui vont et viennent, « le ressac », comme les grandes personnes l'appellent. Elle écouta plus attentivement. Mais oui, c'était bien le bruit de la mer qu'elle entendait. Et voilà, qu'en plus, goûtant avec sa langue les gouttelettes qui glissaient le long de son petit nez, elle eut l'impression que l'eau était salée. Bizarre, bizarre, pensa-t-elle….
Lisou-Bisou, ne croyait pas si bien dire. La fenêtre s'ouvrit toute grande, la mouette entra et se posa sur le rebord intérieur de la fenêtre.
- Lisou-Bisou, veux tu t'envoler avec moi? demanda la mouette. J'ai envie d'aller me promener au-dessus de l'océan, voir les plages et les palmiers. Si tu veux, je t'emmène.
- Mais, je ne peux pas, répondit Lisou-Bisou, je suis toute nue, je vais avoir froid et je suis bien trop grande pour toi! Et juste pour savoir, tu viens de ma chambre ou …
- Ne pose pas tant de question, allez viens, et n'aie crainte, dit la mouette, tu n'auras pas froid; tu vas t'enfouir dans mes plumes blanches et je vais grandir. Allez, viens.
Lisou-Bisou réfléchit une seconde et sans l'ombre d'une hésitation, elle répondit:
- D'accord. Mais deux minutes, j'ai plein de savon, attends au moins que je me rince, et puis je garde ma serviette.
Lisou-Bisou prit la pomme de douche pour se rincer à toute vitesse, enfila sa culotte verte à pois roses, s'enveloppa dans sa serviette bleue, et hop, elle monta sur le dos de la mouette qui l'entoura de ses plumes blanches et douces comme du velours, et s'envola.
Un magnifique voyage:
Sous elles, les villes avec leurs toits de tuiles rouges et d'ardoise grise défilaient. Les voitures se suivaient en file indienne, formant comme de longs serpentins de couleurs.
Puis, ce furent des champs jaunes et verts qui filaient à vive allure et soudain, magnifique, la mer, vaste et bleue. Lisou-Bisou était émerveillée.
- Mais je vole, ma parole, chantait-elle à tue-tête. Ah Félix, si tu pouvais me voir!!!
Brusquement, la mouette plongea vers le bas.
- Cramponne-toi, Lisou-Bisou, on descend.
Elles arrivèrent sur une jolie plage au sable doré.
Mais à peine finissait-elle sa question, qu'elle vit le petit bateau rouge de plastique de la salle de bains, soudain devenu un beau voilier aux voiles blanches; et plus étrange encore, elle naviguait, à présent, emportée par le vent, entourée par ses deux canards oranges devenus des dauphins, et ses deux poissons verts aux écailles dorées qui sautaient dans les vagues.
Lisou Bisou s'amusait comme jamais!
Pendant qu'elle virait à bâbord ou tribord comme un vrai moussaillon, la mouette était partie retrouver ses compagnes qui, aux cris qu'elles poussaient, montraient combien elles étaient heureuses de la retrouver!
- Je bavarde juste un peu, amuse-toi; je reviens te chercher dans un moment, dit-elle à Lisou-Bisou.
A ce moment, Lisou-Bisou entendit un petit garçon appeler:
- Au secours, au secours, qui peut venir m'aider? Mon bateau s'en va dans le vent et j'ai perdu une rame. Qui peut la rattraper?
N'écoutant que son courage, Lisou-Bisou, sauta dans la mer et nagea vigoureusement jusqu'à la rame que le courant entrainait.
Avec l'aide de ses deux canards-dauphins, la rame fut bientôt rattrapée et rendue au jeune garçon.
- Merci, merci vraiment beaucoup, lui cria-t-il.
- Pas de quoi, pas de quoi, lui répondit la mouette qui était revenue.
- Comment, pas de quoi, dit Lisou-Bisou, indignée à la mouette!! Tu ne manques pas d'air! Mais de quoi te mêles-tu? Ce n'est pas toi qui l'as rattrapée. Tu n'y es pour rien. Ca alors!!
- Comment, j'y suis pour rien! Mais c'est moi qui t'ai amenée ici et….
Et hop, Lisou-Bisou les fit monter dans le bateau, à côté d'elle, pour plus de sureté.
Le soleil commençait à baisser et bientôt, il allait plonger lui aussi dans la mer.
- Il est temps de rentrer, dit Lisou-Bisou à la mouette, Maman va s'inquiéter. Allez viens, on rentre la maison.
-D'accord répondit la mouette, mais je te préviens, je te ramène à la maison mais moi je ne retourne pas au plafond de ta chambre.
- Ah! Je comprends mieux maintenant! Je me disais bien que tu avais un air de famille… Pas de problème, je dirais à maman que la corde s'est cassée et que je t'ai rangée dans mon coffre. Mais promets-moi que tu reviendras parfois.
Lisou-Bisou grimpa alors sur le dos de la mouette, mais en s'envolant, la serviette bleue, emportée par le vent dans les nuages, disparut. Alors Lisou-Bisou s'enfouit sous les plumes blanches jusqu'à ce qu'elle aperçoive le toit de leur maison.
- Attention, on descend. On arrive. Accroche-toi, bien, Lisou-Bisou, cria la mouette.
Retour à la maison
Heureusement la fenêtre de la salle de bains était toujours ouverte.
Lisou-Bisou sauta et plongea dans la baignoire: l'eau s'était complétement refroidie.
La maman de Lisou-Bisou arriva pour l'essuyer et s'étonna.
- Mais Lisou-Bisou, où est passée ta serviette? Et qu'est que c'est que tout ce sable par terre? Et cette fenêtre, pourquoi est-elle ouverte? Tu vas t'enrhumer.
Lisou-Bisou ne répondit pas. Elle fit un petit signe d'au revoir à la mouette qui s'envolait.
Puis, elle sauta hors du bain, et enveloppée dans une nouvelle serviette rouge, elle fila raconter son voyage à son frère Felix qui, bien sûr, ne voulut pas la croire.
- Ah! Tu ne veux pas me croire? Hé bien lèche mes cheveux. Alors ils sont ….??
- Salés! ……Ca alors!! Raconte!!
Lisou-Bisou lui raconta tout, à condition qu'il garde le secret. Félix constata que la mouette de leur chambre avait bien disparu et dit:
- Incroyable! Et si moi aussi je prends un bain, tu crois que la mouette reviendra?
- Si tu sais battre des pieds, faire des vagues avec tes mains, entrouvrir la fenêtre, fermer les yeux, et désirer très fort qu'elle revienne… Pas de problème….elle viendra.
Et c'est ainsi, que de temps à autre, Lisou Bisou et de Félix étaient emportés vers la mer: le petit bateau de plastique rouge devenait un beau voilier blanc; les canards devenaient des dauphins; les poissons verts aux écailles dorées devenaient (parfois) des sirènes; les cheveux de Lisou-Bisou et de Félix avaient un drôle de goût de sel…...et il y avait sur les carreaux de la salle de bains des petits tas de sable qu'ils balayaient en secret.